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Thomas McIntosh

Ondulation

Thomas McIntosh, Mikko Hynninnen et Emmanuel Madan, Ondulation, 2002 (video)
Thomas McIntosh, Mikko Hynninnen et Emmanuel Madan, Ondulation, 2002 (video)
Thomas McIntosh en collaboration avec Mikko Hynninnen et Emmanuel Madan, Ondulation, 2002 (video)
Thomas McIntosh en collaboration avec Mikko Hynninnen et Emmanuel Madan, Ondulation, 2002 (video) Thomas McIntosh en collaboration avec Mikko Hynninnen et Emmanuel Madan, Ondulation, 2002
Thomas McIntosh et Emmanuel Madan, finale, 2001 (video)
Thomas McIntosh et Emmanuel Madan, finale, 2001 (video)
On entre dans une salle plongée dans la pénombre et occupée par un immense bassin d’eau parcourue par des ondes concentriques. On comprend intuitivement que les sons ambiants entretiennent une étroite relation avec l’ondoiement d’autant plus que le mouvement de l’eau est réfléchi sur les murs entourant le bassin grâce à un jeu d’éclairage raffiné. En s’approchant, il devient clair que les sons proviennent de haut-parleurs dissimulés sous le bassin, source du mouvement à la surface de l’eau. L’eau agit comme médium au sens de moyen terme : animée par le son et balayée par les faisceaux lumineux, elle donne lieu à des apparitions riches en évocations. À l’état latent, une métaphore photographique est à l’œuvre dans l’installation : l’eau semble avoir les propriétés d’une plaque sensible, le son s’y imprime en quelque sorte, il est révélé par le mouvement et les réflexions saisissantes projetées aux murs.

Présentée comme une « sculpture temporelle », Ondulation (2002) (1) est une composition pour eau, son et lumière conçue par Thomas McIntosh en collaboration avec son complice Emmanuel Madan (le tandem est connu sous le nom [The User]) (2) et Mikko Hynnimen, concepteur sonore, éclairagiste, scénographe et compositeur établi à Helsinki, en Finlande. L’installation s’inscrit dans le prolongement de finale (2001), la dernière œuvre conçue dans le cadre du projet Silophone. (3) Lors de cette performance, différentes matières solides, liquides et gazeuses étaient placées sur d’énormes haut-parleurs et animées à l’aide de signaux sonores générés par ordinateur. McIntosh et Madan constatent alors une relation directe entre la surface de l’eau placée dans le haut-parleur et le son émis par celui-ci. L’onde acoustique se traduit en onde aquatique. De même, la variation d’intensité sonore ou l’ajout de nouvelles fréquences se traduisent par des correspondances formelles à la surface de l’eau.

McIntosh et ses collaborateurs ont poursuivi l’exploration amorcée avec finale en s’intéressant de plus près au phénomène de la synesthésie où une sensation visuelle peut s’éprouver par analogie avec une perception auditive – ce qui est précisément l’expérience proposée avec Ondulation. En effet, la simultanéité est telle entre les ondes sonores et lumineuses – la vibration du son est identique aux rythmes de l’image aux murs – que l’on a l’impression de voir le son et d’entendre l’image. L’adéquation des éléments entre eux laisse le spectateur songeur quant à la cause et l’effet de ce qui se passe sous ses yeux. Paradoxalement, bien que l’œuvre se déroule forcément dans la durée, l’on perd la notion du temps, happé par l’ondoiement à la surface de l’eau et le déploiement d’arabesques lumineuses aux murs. Avec Ondulation, McIntosh propose une expérience qui, au-delà du champ de l’esthétique, s’éprouve dans le (monde) réel et non seulement dans l’imaginaire ou le symbolique.

Parmi les précédents artistiques partageant des affinités conceptuelles et formelles avec Ondulation, mentionnons Mud Muse (1971) de Robert Rauschenberg et Mediations (towards a remake of Soundings) (1979/86) de Gary Hill. Mud Muse est le fruit d’une collaboration entre Rauschenberg et des ingénieurs dans le cadre d’une exposition, Art and Technology, organisée par Maurice Tuchman et présentée au Los Angeles County Museum en mai 1971. L’œuvre consiste en un grand bassin d’aluminium et de verre, rempli de bentonite et d’eau. Un système pneumatique activé par le son provoque des éruptions ou un bouillonnement à la surface de la matière. Contrairement à Ondulation, le son n’est pas audible et, misant sur la réflexivité, Rauschenberg a fabriqué une bande-son à partir d’enregistrements des sons émis par le bouillonnement même. Avec Mediations, Gary Hill crée une corrélation entre la perception visuelle et acoustique. Il s’agit d’une bande vidéo où l’on voit un haut-parleur occupant tout l’écran d’un moniteur. Une main pleine de sable entre dans le cadre et dépose lentement le sable sur le haut-parleur. Le son d’une voix décrivant l’action qui se déroule sous nos yeux propulse le sable dans les airs. Avec cette simple manœuvre, Hill donne à voir la voix.

La recherche menant à la réalisation d’Ondulation s’est effectuée en trois étapes : la construction de l’instrument, la conception du système d’éclairage et la composition d’une œuvre audio-visuelle présentée en performance, car Ondulation se présente sous forme de performance et d’installation. McIntosh et ses collaborateurs ont d’abord travaillé à une version réduite de l’instrument pendant une résidence à la Société des arts technologiques (SAT), à Montréal, durant l’été 2002. Une seconde résidence au Lume Media Centre à Helsinki, en Finlande, leur a permis de construire l’instrument dans les dimensions souhaitées et de produire la version performance d’Ondulation, présentée en première mondiale lors du Avanto Media Arts Festival en novembre 2002, à Helsinki. En juillet 2003, toujours au Lume Media Centre, ils raffinent l’instrument et terminent la composition exécutée lors des performances. La performance Ondulation est de nouveau présentée en août 2003 durant le Helsinki Festival. En février 2004, la version installation est présentée en première mondiale durant le Mois Multi, à Québec, et par la suite lors de l’exposition High-Tech/Low-Tech à la Wood Street Galleries, à Pittsburgh, au printemps 2004. En 2005, le public montréalais a eu l’occasion de faire l’expérience d’Ondulation présentée dans ses deux versions au Musée d’art contemporain de Montréal.

Jacques Perron © 2005 FDL