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Geert Lovink, My First Recession

Geert Lovink, My First Recession, 2003
Lovink, Geert. — My first recession : critical Internet culture in transition. — Rotterdam : V2_Organisation, Institute for the Unstable Media, 2003. — 296 p. — Comprend une bibliographie.

Dans cet essai, Geert Lovink tente de cerner les manifestations d’une culture critique propre à Internet qui ferait contrepoids à la privatisation grandissante du contenu sur le Web. Une série d’études de cas permettent d’éclairer le contexte d’émergence de cette culture dans les listes de discussion et autres plates-formes de diffusion en ligne. Lovink utilise ensuite les résultats de ses analyses pour formuler des conclusions sur le potentiel, non réalisé, selon lui, de ces médias.

Dans le premier chapitre, « Post Speculative Internet Theory », Lovink commente trois méthodes d’analyse d’Internet comme phénomène social. Hubert L. Dreyfuss représente la faction conservatrice et moralisatrice des études sociologiques du Web. Manuel Castells offre une analyse plus complexe de l’infiltration d’Internet au sein d’institutions publiques et privées. Lawrence Lesig, pour sa part, souligne les dangers d’une mainmise des grandes sociétés sur le Web qui se présentait, à l’origine, comme une structure ouverte. Toutefois, Geert Lovink juge que ces analyses souvent polarisées négligent le phénomène des réseaux parallèles. Dans le deuxième chapitre, « Anatomy of Dotcom Mania », Lovink décrit l’essor du commerce électronique entre 1990 et 2000, ainsi que l’éclatement de cette bulle avec la chute de l’indice boursier sur les nouvelles technologies. Il commente également divers points de vues théoriques émis pendant l’essor de la soi-disant nouvelle économie. Dans le troisième chapitre, « Deep Europe and the Kosovo Conflict », Lovink présente sa première étude de cas d’un réseau parallèle : la liste de discussion Syndicate, créée en 1996, et le projet Deep Europe, qui tissait alors des liens entre diverses communautés d’Europe de l’Ouest et de l’Est. En accompagnant son analyse de citations issues de la liste de discussion, Lovink montre dans quelle mesure ce réseau s’ouvre graduellement à des intervenants qui ne proviennent pas du milieu des arts médiatiques. Cette participation devient d’autant plus grande au moment des interventions de l’OTAN au Kosovo, où Syndicate fait office de média d’information alternatif. En 2000, Syndicate s’éteint par suite des interventions d’agents nocifs ou de « Trols », saturant la liste de messages cryptés. Lovink analyse dans le détail les enjeux que pose l’essor d’une telle tribune constituée collectivement qui s’expose ainsi à ce type de surcharge informationnelle. Dans le quatrième chapitre, « Principles of Streaming Sovereignty », Lovink cartographie l’utilisation de médias en transmission continue (streaming medias) et de la webdiffusion (webcast) par des groupes d’artistes et d’activistes. Il se penche sur le réseau Xchange, créé à Riga (Lettonie), en 1997, qui a donné fruit à de nombreux projets de collaboration entre intervenants habitant des régions éloignées géographiquement. En rapportant les interventions des membres du réseau, Lovink tente de définir le « streaming » par les activités qu’encourage ce type de diffusion (l’échange de données en direct, le partage de fichiers) plutôt que dans une optique strictement médiatique ou technologique (la vitesse des bandes passantes, la résolution des données à l’arrivée). Dans le cinquième chapitre, « The Battle Over New Media Education », Lovink fait état de l’émergence récente des départements d’étude en nouveaux médias dans les universités. À partir d’entretiens avec des professeurs, Lovink évalue deux approches pédagogiques prédominantes dans ce secteur. La première méthode d’enseignement met de côté la formation technique pour familiariser l’étudiant aux aspects théoriques de sa pratique. L’autre approche, plus adaptée à la demande du marché, insiste sur l’acquisition de compétences informatiques. Lovink croit, pour sa part, que les cursus en place sont à repenser en fonction de nouveaux paradigmes qui ne découlent pas d’un modèle de production issu du cinéma ou d’un parti pris théorique.

Le sixième chapitre, « Oekonux and the Free-Software Mode », recense les tenants et aboutissants de la diffusion de logiciels ouverts par le truchement de réseaux alternatifs. Lovink s’intéresse ici à la liste allemande Oekonux, dont les participants s’organisent autour du projet de licence publique d’utilisation de logiciels ouverts qui, selon eux, représente un modèle pour une nouvelle forme d’économie. Lovink met l’accent sur l’intrication des plans technologiques et culturels dans une telle structure d’échange où la discussion en ligne devient métaphore d’une société à venir. Dans le septième chapitre, « Defining Open Publishing », Lovink analyse le phénomène des blogues, plates-formes de messagerie qui tendent désormais à se substituer aux listes de discussion, populaires dans les années 1990. En conclusion, Lovink fait le point sur l’état d’une culture parallèle d’Internet quand, selon lui, ses éléments les plus subversifs appartiennent au passé. Il ouvre la discussion en stipulant que le logiciel, avec sa capacité de se fondre au contexte d’utilisation, peut jouer le rôle de médiateur entre l’expérience sociale et les possibilités technologiques.

Vincent Bonin © 2004 FDL